Journaliste, présentatrice de l’émission Ailleurs dans le monde sur RTI1, Fatim Djédjé était, samedi soir, parmi les spectateurs au stade olympique Alassane Ouattara d’Ébimpé. Comment a-t-elle a eu accès au stade alors qu’elle n’avait ni ticket ni accréditation la veille, la cérémonie d’ouverture suivie du match inaugural Côte d’Ivoire – Guinée Équatoriale (2-0), la polémique sur l’ambiance, le nombre de spectateurs, etc. Elle raconte son expérience à Abidjanshow.com.
Fatim, comment as-tu réussi à assister au match d’ouverture, alors que la veille tu n’avais pas de sésame ?–Je n’avais pas préparé cette CAN avant d’aller en congé. Je me suis dit de toutes façons, je ne suis pas journaliste sportive, donc je n’avais pas pensé à le faire. Et quand je suis revenue de voyage, la veille du match d’ouverture, il y avait rupture de stock de maillots des Éléphants et des billets. La chance, grâce aux contacts, j’ai pu acheter un maillot. Et la place au stade m’a été offerte par quelqu’un en Premium.
Es-tu arrivée à temps au stade pour assister à la cérémonie d’ouverture ?–Oui ! C’est vrai que j’ai récupéré mon maillot vers midi, et on m’avait envoyé les références de la place au stade par WhatsApp. Je suis rentrée à la maison me changer, puis manger quelque chose. J’ai dû sortir vers 14h30.
Tout s’est très bien passé, je voyais des gens sur les différentes voies. On entendait les gens dire, on ne sent pas l’esprit de la CAN mais avec ces gens vêtus de leurs maillots, même ceux qui n’allaient pas au stade, c’était émouvant. On voyait du Orange-Blanc-Vert partout. Je me suis arrêtée pour acheter un drapeau et un bracelet chez un vendeur à la sauvette (elle rit). Pour être dans l’ambiance.
C’est à l’approche du stade qu’il y a eu des embouteillages, ce qui se comprend. J’ai laissé la voiture pour emprunter l’un des bus recommandés pour avoir accès aux environs du stade. Je crois que le fait de laisser les voitures particulières arriver jusqu’à ce niveau a créé un petit cafouillage qui a même ralenti un peu les bus des joueurs. Mais l’escorte et les policiers ont pu gérer tout ça. Le bus nous a déposé et le reste s’est fait à pied comme je l’ai dit.
C’était quand même assez loin et j’ai demandé à un de mes amis sous la forme de plaisanterie si nous aussi on partait jouer un match, puisqu’on a marché comme si on faisait un entraînement. Mais c’était bon enfant. Si c’était utile à la bonne organisation, on ne va pas chipoter, même si des gens s’en plaignaient. Maintenant je peux comprendre pour les personnes handicapées, les enfants ou les personnes âgées. J’espère qu’ils prévoient aussi de faciliter le trajet pour ces gens-là. Car, c’était une sacrée marche…
–Ensuite, à l’arrivée, il fallait trouver les entrées correspondant aux tickets. On a été orientés. Je me suis installée. Il y avait encore les préparatifs avant l’événement. On les voyait s’affairer au milieu de la pelouse. Pendant ce temps, il y avait un Dj qui mettait de l’ambiance, on dansait sur les chansons du moment, Coup du marteau, Magic System, les chansons sorties actuellement sur la CAN, etc.
Un des moments forts dans l’enceinte ?–C’est quand on a vu arriver la voiture du Président Alassane Ouattara. Au début, on ne savait pas que c’était lui, parce qu’il n’avait pas ouvert le toit pour se montrer. On se demandait même qui c’était. Et d’un coup, quand il est apparu par l’ouverture du toit, c’était l’euphorie, des cris de joie ! Franchement, même moi qui suis apolitique, j’étais entraînée.
L’événement n’avait même pas encore commencé, mais on était déjà fiers de tout ce qu’on voyait. C’était un moment de communion entre un homme et son peuple. Tous ceux qui étaient là n’étaient pas forcément RHDP.
On étaient juste fiers d’être ivoiriens, heureux d’accueillir le reste du monde. Je pense aussi que c’était un geste de reconnaissance du peuple, puisque le chef de l’État a pris cet événement à bras le corps, il a même remanié le gouvernement juste pour ça. Et puis, quand la cérémonie a commencé c’était encore magnifique.
Vivre cet événement en direct est forcément marquant ?–Oui. À la télé, je ne sais pas comment ça se présentait, mais sur le terrain, nous, on voyait les changements de décor, toutes ces petites mains qui oeuvraient, ces bénévoles qui s’activaient, etc. C’était impressionnant. Ce sont des choses qui m’ont marqué, en plus de la cérémonie elle-même.
L’arrivée de notre équipe sur la pelouse aussi, ç’a été encore de la fierté. On a chanté en chœur l’hymne national. Pour nous, c’était pareil qu’une finale de Coupe du monde ! On ne se connaissait pas, mais à cet instant-là on étaient tous frères, parents, amis, voisins, etc. Il y avait un lien que seul le football et l’amour de la patrie peuvent créer.
Concernant le jeu des Éléphants ?–Peut-être que ce n’était pas à la hauteur des attentes de tout le monde, mais souvent on nous dit que ça commence doucement avant de monter en régime. Certains sont restés sur leur faim, je comprends. Personnellement, j’avais sous-estimé au début nos amis Bissau-guinéens. C’était une erreur de jugement, parce que je les ai trouvé très bons. De toute façon, la CAN nous démontre maintenant qu’il n’y a pas de petites équipes. On n’a pas été des plus brillants mais l’essentiel est qu’on a gagné ce premier match.
Que penses-tu des propos de l’ancien sélectionneur Claude Leroy qui estime que les supporters ivoiriens n’étaient pas assez chauds dans les tribunes ?–Concernant les propos de Monsieur Leroy, je me demande ce qu’il entend par là ? Sur place, moi j’ai vu une très bonne ambiance.
Comparaison n’est pas raison, mais en Europe quand tu prends les transports par exemple, les gens ne sont pas expressifs comme chez nous. Ils ne se disent pas bonjour, chacun est dans son coin.
J’ai trop vécu là-bas, je connais cet individualisme. Mais ici, les gens se parlent, qu’ils se connaissent ou pas. J’étais assise à côté de gens qui discutaient. Ce n’est pas comme en Europe où chacun est concentré à crier le nom de son joueur.
Là, on était comme dans une cour commune, on échangeait et quand il y avait de l’action on criait. C’est ça aussi la réalité. Il ne faut pas le prendre autrement. Moi, j’ai aimé, je trouve que le public a répondu.
Le chiffre de 36 858 spectateurs affichés, reflètent-ils la réalité de ce que tu as vu ?–Pour les places, quand j’ai vu les chiffres affichés, honnêtement j’étais très surprise. Quand on était à l’intérieur, je disais même à un voisin que le stade était quasiment plein. À vue d’œil, moi je disais qu’il était plein à plus de 80%. Il est vrai qu’on a vu deux ou trois espaces qui étaient clairsemés, mais ça ne peut même pas valoir des milliers de places. Seulement des centaines peut-être. Moi j’ai des vidéos du stade que j’ai filmé.
Je ne peux pas croire ces chiffres. Ce n’est pas moi qui m’occupe de la billetterie, néanmoins quand je passais au tourniquet, j’ai vu qu’il y avait des personnes dont les tickets n’arrivaient pas à valider. On leur disait de se mettre de côté. Je ne sais pas comment ils ont négocié après… Est-ce qu’ils ont finalement fait rentrer ces personnes, sans ce qu’elles soient comptabilisées ? Je l’ignore.
L’homme de ce match pour toi ?–L’homme du match, je ne pense pas que ce soit par hasard qu’on ait désigné officiellement Séko Fofana. C’est mérité, et c’est aussi mon choix.
Ta note sur 10, pour ce premier match ?–Si la cérémonie d’ouverture et l’ambiance sont comprises, je mets un 8 sur 10. Maintenant pour le match uniquement, je mettrais 6. Pour moi c’était poussif, mais c’est le premier match.
Confiante quant à la suite du parcours ?–Pour la suite, je reste extrêmement confiante. On est là pour supporter, on ne va pas lâcher l’équipe à la première difficulté. Comme disent les Ivoiriens, à eux aussi de “jouer rôle” (donner le meilleur : ndlr). Je suis avec eux à fond !